• Accueil
  • Carnets de vol: Guy Rasse

Carnets de vol: Guy Rasse

Carnets de vol: Guy Rasse


Carnets de vol: Guy Rasse

Comme d'autres avant et après lui, c'est par le planeur que Guy Rasse a fait son entrée dans le monde de l'aviation.

"Je devais avoir quatorze ou quinze ans et je faisais mes humanités au Collège à Saint-Gilles. Un rhétoricien, qui était Cadet de l’Air, est venu faire une présentation sur le vol à voile et les Cadets plus spécialement. J'ai été très attiré par ce que j'ai vu et entendu. J'ai pris les formulaires de renseignements et d’inscription et demandé l’autorisation à mes parents de rejoindre les Cadets. C'est ainsi que j'ai commencé en 1966 à suivre les deux ans de cours au sol qui se donnaient le week-end au 15e Wing à Melsbroek. C’était déjà un premier pas dans le milieu de la Force Aérienne.

En juillet 1968, j’ai commencé mon entraînement en vol, qui fut couronné par mon 1er solo. Avant d'effectuer le premier vol en planeur, les bases du vol nous étaient enseignées à bord de Piper Cub avec des instructeurs de l’Esc Light Avi de Brasschaat. J'ai obtenu mon brevet B en juillet 1968, la grande aventure commençait.

Les Cadets étaient tout naturellement l'antichambre de la Force Aérienne. L’uniforme était de rigueur, l’encadrement était fait par des militaires suivant les règles militaires... L'objectif était de pouvoir former de futurs candidats pour l'Air Force. A l'époque, la Force Aérienne y mettait les moyens, une belle flotte de planeurs, les remorqueurs étaient des SV4B de l’école de pilotage de Gossoncourt. Cela m’a permis de me perfectionner et d’acquérir de l’expérience sans devoir débourser une fortune. C'était une sacrée expérience et une bonne école pour mon avenir de pilote de chasse.

J’ai reçu mes ailes de Cadet en septembre 1968 à Bevingen. Le week-end, j’effectuais mes vols à Gossoncourt, ce qui représentait un petit plus pour la suite. Entre-temps, j'ai terminé mes humanités et j'ai posé ma candidature comme pilote à la Force Aérienne. J’ai été accepté comme officier auxiliaire le 15 décembre 1969."

De retour à Gossoncourt, Guy Rasse et ses camarades de promotion entament leur écolage sur le vénérable SV4B et sur son fringant successeur, le Marchetti SF.260M.

"J'ai intégré la promotion 70C, la meilleure évidemment ! Nous étions 27 ou 28. Les quatre premiers mois étaient consacrés à l'entraînement militaire de base (drill, survie, marches de jour et de nuit, etc.). Puis commençait l’entraînement en vol. Nous avons eu la chance d’être la dernière promotion à avoir connu le SV4B. Les pistes en dur venaient d’être inaugurées, ce qui constituait un sérieux challenge pour les débutants que nous étions. Nous devions être solo SV4B pour prétendre continuer sur Marchetti. Nous avons effectué 20/25 heures sur SV4B, vols en circuit et un peu d’acrobatie. Ce fut une fantastique expérience pour de jeunes élèves de 18 ans.

Les compteurs ont été remis à zéro lors du passage sur SF.260M : lâchage solo, entraînement à la navigation, vol en formation, vol aux instruments et tests. L’entraînement était intensif et ne permettait pas beaucoup d’échecs. Il fallait vite s'adapter sinon c’était la porte de sortie. À cette époque, la Force Aérienne recrutait trois promotions par an. Nous avons vécu une expérience assez spéciale. En effet, la Force Aérienne avait formé de jeunes pilotes brevetés comme moniteurs et les avait affectés à notre entraînement, ce qui contrastait avec les "vieux" moniteurs que nous avions connus sur SV4B.

Je garde un bon souvenir de Gossoncourt. Les premiers mois, nous passions beaucoup de temps sur la base. La permission de week-end commençait le samedi midi et durait jusqu’au dimanche soir... Le mercredi soir, nous avions quartier libre jusqu'à dix heures pour les non-solos et jusqu'à minuit pour les solos."

En février 1971, la promotion 70C quitte Gossoncourt pour la base de Brustem, située à quelques kilomètres de là, qui abrite l'École de Pilotage avancé.

"Nous sommes arrivés à Brustem pour être formés sur Fouga. Nous étions les derniers à faire cette formation en parallèle avec des élèves hollandais. Autant dire qu'on a parfois rejoué 1830 ! Il y avait de l'ambiance dans les blocs.

Il y avait deux escadrilles de Fouga Magister, Diana et Clearskin. La cadence des vols était intensive. Nous volions soit avec des moniteurs belges ou hollandais mais nos checks se faisaient toujours avec un moniteur belge. Nous étions testés régulièrement et l’esprit de décision et l’initiative étaient les maîtres mots durant l’entraînement afin de nous préparer à notre futur métier de pilote de chasse.

Le CM170 était impressionnant pour les jeunes que nous étions. C'était notre premier avion à réaction. Il pouvait être armé de deux mitrailleuses et de roquettes. Il était très agréable en formation, même si parfois il manquait de puissance. Nous avons effectué nos premiers vols de nuit en CM170. Le circuit était basique, en rectangle et par beau temps.

Tout le groupe est arrivé au bout de la formation sur CM170. La promotion était bien soudée, un très bon esprit y régnait. C’était important. La fin de notre apprentissage sur Fouga signifiait aussi le départ des Hollandais..."

Un départ qui correspond avec le retour des T-33 à Brustem.

"Nous nous sommes ainsi retrouvés les premiers sur T-33 en Belgique, dans une toute nouvelle escadrille, la 11e, commandée par un nouveau CO, le Major aviateur Bosman, qui venait du F-104. Tout le monde était nouveau dans le système et il y a eu une très bonne intégration avec les moniteurs, qui provenaient de différentes escadrilles. Nous avons inauguré le nouveau syllabus d'entraînement. Il y avait en tous les cas une sacrée ambiance.

Par rapport au Fouga, le T-33 était un avion lourd, plein d'inertie et pas facile à manœuvrer au sol. La conversion sur T-33 comprenait deux volets, le vol basique avec le lâchage solo et puis un entraînement plus axé sur l’opérationnel.

Nous avons été brevetés en avril 1972. La remise des Ailes a eu lieu à Gossoncourt. La promotion a été divisée en deux groupes : quatre d'entre nous ont été sélectionnés comme moniteurs sur Fouga en France et le deuxième groupe, dont je faisais partie, a été désigné pour suivre le cours Mirage 5 à la 8e escadrille de Bierset. Nous avons eu l’honneur d’être les premiers jeunes à être entraînés sur Mirage 5 au sein de la Force Aérienne belge. C'était un nouveau challenge pour les instructeurs et nous-mêmes. En effet, les moniteurs avaient effectué la conversion des pilotes (expérimentés) des escadrilles F-84F et se trouvaient maintenant en face de débutants, de “jeunes yéyés “...

Pour l'anecdote, nous avons entamé les premiers cours Mirage 5 en tant que non-brevetés et ce n’est que deux semaines plus tard que nous avions reçu nos ailes. À la fin du cours au sol, l’entraînement simulateur a eu lieu en France, à Luxeuil. Après le simulateur, la conversion de base et opérationnelle s’est effectuée au sein de la 8e escadrille. La conversion opérationnelle couvrait tous les domaines de notre future affectation : chasseur-bombardier."

Après sa conversion, Guy Rasse est versé dans sa première unité opérationnelle, la 1ère escadrille.

"Nous étions sept à la fin de l’entraînement Mirage 5. Trois ont été affectés à la 2e escadrille à Florennes et les quatre autres, à la 1ère escadrille. Lorsque nous sommes arrivés en escadrille en septembre 1972, la base se préparait à effectuer le premier Taceval Mirage 5 (évaluation OTAN des capacités opérationnelles de la base). On nous a donc rapidement pris en main pour que nous soyons prêts et qualifiés pour toutes les missions allouées à l’escadrille et pour les différentes disciplines de tir. En décembre, après une campagne de tir de trois semaines en Corse à Solenzara, notre entraînement opérationnel se clôturait. Il nous restait à assimiler toutes les procédures opérationnelles. En conclusion, l’année 1972 a été pour nous ardue et pleine de découvertes, il a fallu s'accrocher. Pour nous qui sortions de l'école, piloter et surtout poser le Mirage était un sacré challenge.

Un événement a marqué pour moi le mois de septembre 1972. En effet, l’état-major m’a désigné, en tant que le plus jeune breveté ayant été Cadet de l’Air, pour remettre les Ailes de Cadet au général aviateur er Leboutte, président des Cadets de l’Air à l’époque. Ce fut un grand honneur pour moi d’effectuer cette mission...

La mission de l’escadrille était la "chasse-bombe", attaque d’objectifs au sol et support des unités sol. Au point de vue armement, l’avion était équipé de deux canons de 30mm et disposait de plusieurs points d’emport sous les ailes. Les différentes disciplines de tir étaient le tir canon, le largage à basse altitude de bombes et le tir de roquettes qui était assez spectaculaire car il fallait venir de haut en piqué stable.

Et c'est à la fin de ce Taceval, en 1973, alors que j'étais "full opérationnel" sur Mirage, que j'ai appris que j'étais muté à Beauvechain ! J'étais triste de partir car il y avait une sérieuse ambiance au sein de l’escadrille et le Taceval avait soudé le groupe. Comme jeunes nous nous étions bien intégrés."

Guy Rasse quitte donc Bierset et le Mirage 5 pour une nouvelle conversion, le Starfighter.

"L'état-major ayant décidé de tester le transfert de jeunes pilotes "mûris" sur Mirage vers le F-104, je me suis retrouvé au 1er Wing de Chasse de Beauvechain. J’ai été transféré en même temps que mon compagnon de prom, J-C Timmermans, 'Tim', qui volait à la 2e escadrille de Florennes.

Nous sommes arrivés tous les deux à Beauvechain, au Flight TF, dans une ambiance assez "fraîche". Il n’était pas facile de s’intégrer parmi les "chasseurs". Ma conversion s'est néanmoins effectuée normalement : solo, conversion de nuit, par mauvais temps, interceptions, tir, etc. J’ai fait mon premier solo sur le FC08, le 4 juillet 1973, un avion que, par l’effet du hasard, j’ai revu en France, à Savigny les Beaunes, où il est conservé.

Le passage en escadrille s'est fait en septembre et j’ai rejoint la 349e escadrille où j'ai poursuivi ma conversion opérationnelle. L’ambiance s’est réchauffée au sein de ce milieu ultra professionnel et j'ai été pris en main et les choses se sont mises petit à petit en place.

Après environ 18 mois de conversion (au Flight TF et en escadrille), j'ai reçu des mains du CO mon macaron de la 349 et mon 'goedendag' qui indiquaient que j'étais à présent opérationnel sur l'avion. Cette conversion prenait du temps car les interceptions en subsonique, supersonique, de jour, de nuit, par beau temps et surtout mauvaise météo, demandaient beaucoup de précision et de travail de coordination avec les stations radar au sol qui nous guidaient.

Dès que l’on était opérationnel, une de nos tâches était le QRA (Quick Reaction Alert). Nous étions de garde 24 heures auprès des avions armés de 2 missiles AIM-9B et canon chargé. Le but était de réagir très vite, 15 minutes entre le déclenchement de l’alerte et le décollage, c'est-à-dire 15 minutes pour sortir du bâtiment pilotes, courir à l’avion, s’installer, mettre en route, se rendre sur la piste et décoller. Le premier QRA était toujours supervisé par un pilote chevronné.

Les missiles qui équipaient les F-104 étaient d'AIM-9 Bravo, une technologie qui datait de la guerre du Viêt Nam, et étaient très peu performants s’ils étaient exposés au soleil. J’ai eu l'occasion de tirer plusieurs de ces missiles dont les lots venaient à expiration. Généralement, nous volions en formation de deux avions, équipés chacun d'une roquette 5 pouces et d'un missile. Le premier avion tirait sa roquette et, quelques secondes plus tard, le pilote du second verrouillait son missile dessus et le tirait. Ensuite, on échangeait les rôles.

Le 1er Wing faisait partie de la 2 ATAF et travaillait en collaboration avec les Phantom FRG.2 de Wildenrath qui, avec Beauvechain, faisait partie du secteur 2. Nous pouvions opérer librement sur toute l'Allemagne, les Pays-Bas et jusqu'à la frontière danoise. À l'entraînement, les interceptions se faisaient entre nous. Parfois, nous interceptions d’autres avions, après qu’ils aient donné leur accord. Il arrivait aussi que certains avions de ligne acceptent d’être interceptés.

Les caractéristiques de vol du F-104 étant très pointues, il fallait toujours être attentif à sa vitesse. L’avion avait l'avantage d'être très rapide et d'avoir un moteur qui répondait très bien aux sollicitations du pilote. En 1977, une nouvelle approche du combat aérien nous a été enseignée. Des cours de DACT (Dissimilar Air Combat Training) nous ont été donnés par les 'Top Gun' de l'US Navy ainsi que par les Aggressors de l'USAF. Un manuel, rédigé par Snake Reaves si je me souviens bien, a également été développé sur les tactiques à employer pour utiliser correctement le F-104 dans son enveloppe. En résumé, il nous était conseillé d’utiliser la vitesse de l’avion et de la convertir en altitude lors d’engagements contre un adversaire plus maniable, et de ne jamais engager un combat tournoyant dans le plan horizontal. En septembre 1979, j'ai aussi participé au premier TLP volant à Jever.

Contrairement à ce qu'on a beaucoup dit, on pouvait faire énormément de choses avec le F-104 mais il fallait le faire correctement et respecter l'enveloppe de vol de l'avion. On jouait avec la vitesse, les flaps et le moteur.

L’allié de pratiquement toutes nos missions, c'étaient les radars d’interception au sol, les stations GCI [1] , dispersés sur tout le territoire de l’OTAN. On formait un team avec eux et ils étaient très réactifs à nos demandes en vol.

Une dernière caractéristique typique au F-104 était son atterrissage, rapide et plat en approche. Par temps de pluie et de nuit, cela devenait un sérieux challenge. Le vent de travers posait pas mal de problèmes car à la sortie du "drag chute", celui-ci pouvait se mettre dans le vent et tirait l’avion de travers. Il était parfois nécessaire de le larguer assez rapidement pour ne pas sortir de piste. En cas de problèmes de freinage, l’avion était équipé d’une "crosse d’appontage" qui permettait d’accrocher le câble en bout de piste. Les barrières conventionnelles équipées d'un filet ne servaient à rien, les ailes du F-104 étant tellement coupantes que le filet était découpé.

En juillet 1979, j'ai eu la chance d’être le dernier pilote de Beauvechain à atteindre 1000 heures de vol sur F-104. Avec l’arrivée du F-16, plus personne n'a atteint ce chiffre au 1er Wing de Chasse."

À la 349e escadrille, le F-104G se retire pour laisser la place au F-16, chasseur de nouvelle génération.

"Le premier F-16 est arrivé à Beauvechain le 26 janvier 1979. J'ai fait ma conversion en décembre. Comme nous étions les premiers F-16 d’Europe, il a fallu créer de nouvelles procédures tactiques et d'interception avant la première évaluation de l’OTAN (Taceval). Tout cela a demandé pas mal de travail et ça n'a pas toujours été très simple. L'avion a connu ses maladies, propres à une nouvelle machine, ses problèmes électroniques, parfois dus à notre méconnaissance de l'avion. Nous avons découvert le fly-by-wire, le système d'armement, etc.

En juillet 1988, j'ai participé au Red Flag, exercice qui a lieu au Nevada dans une zone d'une superficie équivalente à la Belgique et la Hollande réunies.

Red Flag, c'était un exercice très impressionnant. Les moyens déployés étaient énormes. Les participants étaient de toutes nationalités, la flotte d’avions était composée de F-15, F-16, F-18, F-4 en tous genres, F-5 Aggressors, AWACS, tankers, etc. Les missions étaient très complexes. Le rythme était d'une mission par jour. Avec les briefings et débriefings, cela prenait toute la journée. La première semaine, on commençait calmement, puis le rythme s'accélérait. Nous volions alternativement comme "agresseurs" et puis comme "escorte". Les missions allaient crescendo et se faisaient dans un environnement électroniquement saturé. Les fréquences radio étaient brouillées par des opérateurs "ennemis" qui parfois nous envoyaient de fausses instructions. En bons Belges que nous étions, nous avions trouvé la parade... en parlant notre "charabia de l’Air Force", un mélange de français/flamand/anglais...aucun opérateur américain n’y a jamais rien compris !

Autre anecdote : au début de notre période F-16, étant les premiers opérationnels sur l'avion, nous avons participé à pas mal d’entraînements avec les autres Forces Aérienne de l’OTAN et entre autres avec les F-15 USAF de Bitburg. Lors des engagements air-air avec les F-15, nous étions obligés de respecter un scénario imposé par leur commandement, scénario dans lequel nous étions toujours supposés être les "targets". Après quelques vols, nous en avons tout doucement eu ras-le-bol de nous faire "abattre". Donc, sans les prévenir nous avons changé le scénario et "abattu" les F-15. Le débriefing fut un peu chaud mais nous en avons profité pour leur faire comprendre qu’un fighter était toujours imprévisible et qu’il fallait toujours réévaluer la menace.

Je suis resté à la 349e escadrille jusqu'en 1985 puis j'ai été appelé à l'OCU [2] pour devenir moniteur. Comme j'avais été successivement officier SA  [3] à la 349 et au Wing, l'état-major a voulu que j'assume cette fonction au QG TAF [4] à Evere. J’ai obtenu l'autorisation de pouvoir cumuler cette fonction avec celle de moniteur à l'OCU.

La fonction de moniteur F-16 était très intéressante et diversifiée. En effet, nous donnions les cours au sol, au simulateur et en vol. Durant ma période de moniteur, nous avons vu défiler des pilotes de Beauvechain, de Florennes et quelques-uns de KB."

Après dix-huit années passées à Beauvechain, dont dix dans le cockpit d'un F-16, Guy Rasse entame une nouvelle aventure sur multimoteur cette fois.

"J'ai quitté l'OCU en 1991. Comme il me restait quatre ans avant ma retraite, j’ai anticipé mon passage futur à la vie civile. J’ai préparé les licences civiles et demandé mon transfert vers l’unité AWACS de l’OTAN.

Quand je suis arrivé sur AWACS, on m'a dit que ce serait calme. La première guerre du Golfe était terminée. J'ai donc commencé ma conversion, tranquille, à raison d'un vol ou deux par semaine. Et c'est à ce moment que les choses ont commencé à s'agiter en Bosnie. Il fallait donc des pilotes d'urgence. Résultat, j'ai suivi un entraînement intensif comme copilote (siège de droite) et puis on m'a demandé de faire aussi l'entraînement à gauche dans la foulée comme commandant.

Le planning était quinze jours en déploiement, une semaine de repos suivie d’une semaine de training et ensuite on repartait pour une nouvelle rotation de quinze jours. J'ai fait environ 2000 heures de vol en deux ans et demi.

La flotte des 18 AWACS était complétée de deux TCA [5] , d'anciens B707 ayant appartenu à la Sabena/Sobelair. Voler sur ces avions nécessitait une deuxième conversion après celle sur AWACS, ce que j’ai fait. Le rôle de ces TCA était principalement le transport des équipages et du matériel lors des déploiements.

Le B707 était un superbe avion à piloter. Par contre, l’AWACS était tout à fait différent. Le radôme de 6 m de diamètre et de 1,5 m d'épaisseur positionné devant les gouvernes arrière de l’avion pénalisait fortement sa manœuvrabilité. La limitation de vent de travers était de 10kts... Le plafond opérationnel était limité à 29 000 pieds.

Pour les missions de surveillance prolongées, nous effectuions du ravitaillement en vol, une phase de vol particulièrement fatigante et stressante pour le crew. Cette manœuvre consistait à intercepter et voler en formation, plus ou moins à 10 mètres en dessous et derrière un KC-135. Ces ravitaillements se faisaient par tout temps, jour et nuit. C’était une bonne leçon de pilotage tout en finesse.

J'ai fait mon dernier vol en Bosnie le 22 décembre 1995, un vol de nuit de huit heures, une durée habituelle pour une mission sur AWACS. Le maximum était de quatorze heures avec un crew. J'ai effectué plus de cent missions de support en Bosnie, ce qui représente à peu près 1000 heures de vol. Dix jours après cette dernière mission, j'étais mis à la retraite.

En conclusion, je considère que j’ai eu beaucoup de chance durant ma carrière à la Force Aérienne. J’ai eu la chance d’être dans les derniers à avoir volé en SV4B, plus tard d’avoir volé sur Mirage 5, F-104G et F-16 et de terminer en AWACS."

Retraite éphémère, car après ces 25 ans à la Force Aérienne et à l'OTAN, Guy Rasse a entamé une seconde carrière de vingt ans dans le civil. Aujourd'hui, c'est avec beaucoup de plaisir qu'il vole sur l'avion qui lui a procuré ses premières émotions aéronautiques, un Piper Cub L4J de 1944.

Piper Cub L4J - OO-YOL Piper Cub L4J - OO-YOL Piper Cub L4J - OO-YOL

 [1]  Ground Control Intercept : interception réalisée sous le guidage d'une station radar
 [2]  Operational Conversion Unit : unité de conversion opérationnelle sur F-16
 [3]  Officier Sécurité aérienne
 [4]  Tactical Air Force
 [5] Trainer Cargo Aircraft : Boeing 707 utilisé comme appareil de transport et de liaison

Interview : Vincent Pécriaux (28 avril 2018)
Photos : collection Vincent Pécriaux


Copyright (c) belairmil

We use cookies

Nous utilisons des cookies sur notre site web. Certains d’entre eux sont essentiels au fonctionnement du site et d’autres nous aident à améliorer ce site et l’expérience utilisateur (cookies traceurs). Vous pouvez décider vous-même si vous autorisez ou non ces cookies. Merci de noter que, si vous les rejetez, vous risquez de ne pas pouvoir utiliser l’ensemble des fonctionnalités du site.